La photo mystère

[Yann]

C'est pour que l'esprit saint puisse passer à travers ?

Tu sais que j'y ai pensé !

Sinon, est-ce qu'il y a quelque chose derrière les trous ?

[FANA92]

Les trous représentent-ils la position des clous sur la croix?

[Gilligan]

Les trous représentent-ils la position des clous sur la croix?

Absolument pas. Dans d'autres édifices, les trous sont alignés, ailleurs encore ils sont groupés avec une distribution aléatoire.

[Gilligan]

C'est pour que l'esprit saint puisse passer à travers ?

Tu sais que j'y ai pensé !

Sinon, est-ce qu'il y a quelque chose derrière les trous ?

Derrière les trous, c'est la maçonnerie. Ce ne sont pas des trous sans fond et je n'ai jamais dit qu'ils étaient vides (oups, je n'aurai pas du le dire !)

[Gilligan]

C'est pour que l'esprit saint puisse passer à travers ?( Une sorte d'hygiaphone papal en quelque sorte)

On peut argumenter que ça diffuse mieux l'esprit saint, toujours d'un point de vue spirituel, mais ces trous ont en fait un utilité (supposée) plus terre-à-terre, au moins pour comprendre la raison de leur existence.

[JPD]

Tes petits trous auraient-ils quelque-chose à voir avec l'acoustique ? Quand je dis "petits trous", je parle de ceux de ta photo, hein !

[Gilligan]

Aurais-tu fait une recherche avec les mots "trous", "mur", "église" ?

[JPD]

Oeuf corse !

[yves_de_paris]

Ces trous servaient-ils pour un support qui n'existe plus ?!

[Gilligan]

Donc, inutile de préciser que tu as la solution. Il s'agit effectivement de trous dans lesquels sont placés des vases en terre cuite, le col ouvert côté ouverture du trou. Cela est censé fonctionner comme un résonateur de Helmholtz (enfin, cela ne s'appelait pas comme ça dans l'Antiquité), autrement dit ces "vases acoustiques" résonnent dans une gamme de fréquences et les amplifient. Les textes du Moyen-Âge parlent d'un facteur d'amplification de 40. Cet effet était connu des Grecs anciens qui plaçaient de tels vases non dans des trous mais sous les dalles sur lesquelles les spectateurs s'asseyaient. L'effet était garanti car la distance entre le vase et la personne n'était que de quelques dizaines de centimètres. En revanche, dans les chapelles et les églises où ces résonateurs sont placés en hauteur, les mesures modernes ont montré qu'il n'y avait aucun effet amplificateur des voix, des chants ou du prêche du prêtre pour deux raisons : d'abord la distance jusqu'aux fidèles est trop élevée dans tous les cas et ensuite, la fréquence de résonance de ces vases n'est pas toujours dans la gamme de celles de la voix humaine. Reste que l'idée de voix venant en quelque sorte du ciel a persuadé leurs inventeurs d'être persuadés d'un effet réel, ce qui était sans doute satisfaisant car cela a duré plusieurs siècles. C'est vrai qu'il reste quelques paramètres qu'on ne maîtrise pas à notre époque, à savoir l'effet des tentures et des peintures appliquées sur la pierre comme c'était le cas autrefois.
Toujours est-il qu'après leur utilisation dans les églises médiévales, cela a été oublié, les trous ont été bouchés, puis redécouverts au XVIIIe siècle lors de rénovations. Enfin, c'est de nouveau retombé dans l'oubli.
En France, on en trouve principalement en Bretagne et très peu dans le Nord et l'Est. Mais c'est une observation probablement biaisée car elle dépend des très peu nombreux inventaires faits jusqu'à présent, sans compter le nombre de chapelles possédant ces trous d'après les écrits qui ont fini en étable ou autres ruines méconnaissables.
On trouve ces vases acoustiques hors de France également. On en trouve aussi dans des mosquées et des synagogues, mais là il n'y a pratiquement pas d'études de cette pratique.
Une explication supplémentaire au fait que l'on ait oublié le but de ces trous avec des vases est qu'il était coutumier dans les siècles passés de faire des trous dans les murs pour fixer les échafaudages lors de la construction, trous que l'on bouchait, mais qu'on pouvait remettre en service si le besoin se faisait sentir lors de travaux ultérieurs.

Merci à mon collègue Romain R. qui nous a fait un exposé sur ces vases acoustiques dans les églises médiévales et les études qu'il avait faites en collaboration avec des archéologues. Merci à lui aussi pour ses photos qu'il m'a autorisé à utiliser pour la photo-mystère.

Dernier détail, la photo a été prise à Quéménéven (29) et il s'agit de la chapelle Notre-Dame de Kergoat du XVIème siècle.